J’ai vécu ce seuil qu’on nomme la dysphorie d’identité de genre. Après avoir passé ma vie à nier qui j’étais, la réalisation que je ne pouvais plus faire semblant d’être un homme, m’entraîna dans une profonde et douloureuse dépression (la dysphorie), et on me dit que je serai le reste de mes jours dans cet état dépressif sévère ou que la voie de la guérison passerait par le changement de sexe, qui est en fait le « traitement» de cette dangereuse dépression.
Pour revenir à la stigmatisation de certains médias, ce week-end, sous la plume de la chroniqueuse de LaPresse Marie-Claude Lortie, signait le papier Voici Katrina qui est un modèle de traitement de la transsexualité avec recherche et modération. Pourtant, dans ce même média, quelques jours plus tôt on pouvait lire Québec a payé 9 millions pour plus de 600 changements de sexe. Pourquoi utiliser ce titre accrocheur? Veut-on dire que c’est trop d’argent, veut-on sous-entendre que c’est de l’argent mal dépensé? Veut-on faire réagir le peuple? Aussi, pourquoi ne réserve-t-on pas le même traitement aux chirurgies de la cataracte, de remplacement de la hanche, aux chirurgies des personnes qui sont en fin de vies ou de toutes autres chirurgies spécifiques? Pourquoi ce traitement «spécial » pour « la seule chirurgie » qui est payée par l’état pour les transsexuelles? Je comprends que la journaliste qui a fait un travail de « demande d’accès à l’information » et qui a interviewé Marie-Marcelle Godbout pour son papier n’est sans doute pas responsable du titrage de son article. N’empêche que ce titre a ouvert la porte à tous ces pourfendeurs des trans qui ne demandaient qu’à sauter dans la mêlée.
D’ailleurs plusieurs sont arrivés avec l’argument « on ne paye pas pour telle intervention (mettez ici l’insémination artificielle, la diminution mammaire ou toute autre intervention que vous jugez légitime) alors on devrait couper pour les trans. Comme si par la magie des vases communiquant, en coupant le 9 millions accordés pour les vaginoplasties ou aux phalopasties, cet argent devenait disponible pour votre propre vision de la médecine idéale. Comme si on coupait pour ces opérations, tout d’un coup, dans sa grande sagesse, le gouvernement mettrait ça dans l’aide sociale, l’éducation ou autre sujet qui vous tient à cœur!!! Aussi, peu de gens réalisent qu’en coupant ce neuf millions, il en coûterait très certainement 72M$ de plus strictement en coût associé aux suicides des trans non opérés, comme je l’expliquais sur ma page Facebook.
Le conseil québécois LGBT a dû réagir à cet article et c’est l’émission Salut Bonjour de TVA qui a reçu sa porte-parole.
Mais là où le bât blesse, est le traitement aberrant qu’en a fait l’émission Éric et les fantastiques à la Radio Energie FM 94,3 Montréal. Éric Salvail, Réal Béland, Mike Ward et Caroline Proulx qui a proposé de discuter des 9 millions de dollars dépensés pour 600 changements de sexe, ont déblatéré des préjugés, des blagues de très mauvais goût et des comparaisons toutes plus boiteuses les unes que les autres. Heureusement Réal Béland a tenté, sans grand succès, de ramener son groupe de « fantastiques » à un peu de décence et un peu de bon sens.
D’écouter Ward dire que :
s’il voulait avoir des souliers rouges, il s’en payerait ou que la plupart des gens qui changent de sexe gardent leur pénis. Ce qui coute cher c’est de virer la saucisse de bord hahaha Ils ne devraient pas changer de sexe parce qu’aller aux toilettes avec un pénis c’est mille fois mieux que d’y aller avec un vagin rabouté
C’était d’une infinie tristesse, mais il semble que ce soit de l’humour. D’ailleurs les gens qui changent de sexe gardent leur pénis? J’aimerais bien voir des statistiques là-dessus. Un vagin rabouté? J’imagine qu’il en a déjà vu plusieurs? Il suggère aussi aux trans d’aller se faire opérer à leur frais au Brésil parce qu’ils ont hot là-bas. Il n,est sans doute pas au courant que le Brésil détient aussi le triste record mondial du plus haut taux de meurtre de transsexuels.
Caroline Proulx quant à elle, en plus de prétendre qu'on ne devrait pas payer pour de telles opérations, avance que "c’est le plus coûteuse des opérations de trans". Ha bon? Vous en savez quoi madame Proulx? Strictement pour ma chirurgie de féminisation faciale ça m’en a coûté 25 000 $. Elle avance aussi que les femmes qui ont eu un cancer du sein et qui ont besoin d’une reconstruction mammaire la payent elle-même parce que c’est vraiment trop long d’attendre après le gouvernement. Vous savez sans doute quel est le délai d’attente pour une opération de changement de sexe? Elle suggère aussi de se faire une association des gens avec des ongles incarnés. Opération qui est déjà couverte par la RAMQ. Elle mentionne aussi que le 9Million ne couvre pas les salles d’opération, l’anesthésie et les médicaments qui sont pris par la suite de l’opération. Encore une fois, vous en savez quoi? L’Anesthésie est couverte dans le 9 millions, de même que les soins postopératoires et les médicaments, comme pour tout autre patient, sont couvert pas l’assurance médicament de tous les Québécois.
Ce qui est triste avec un tel étalage de n’importe quoi, de préjugés, de mépris, d’absence totale de recherche et d’absence de discussion avec des spécialistes ou de trans, est que de nombreux auditeurs écoutent et se font une idée à partir de ces conneries de haut niveau. Si des trans se suicident par désespoir, se font intimider ou se font rejetés, vous aurez un peu de leur sang sur les mains…
Coût d'un seul suicide au Québec
Le coût d’un suicide pour la société est évalué à 849 878 $, incluant les coûts directs pour les services de santé, l’autopsie, les funérailles et les enquêtes de police et les coûts indirects pour les pertes en productivité
Saviez-vous que chez les personnes trans*
- 78% rapportent avoir été victimes de harcèlement verbal
- 48% ont même été victime d’assaut (armé ou sexuel).
- 40% des patients suivis en clinique d’identité du genre en Alberta entre 1996 et 2008, ont eut recours à une chirurgie de réassignation sexuelle.
- De façon générale, 10% des crimes contre la personne au Canada ont des motivations reliées à l’orientation sexuelle! Ce nombre atteint 17% au États-Unis! 8.3%(1/12) des personnes MTF aux États-Unis courent la chance de se faire tuer alors que le taux normal est de 0.005% (1/18000). C’est 1500 fois plus élevé.
- 34% des personnes trans obtiendront un diplôme d’étude supérieure contrairement à 27% dans la population générale.
- 70% ont déjà pensé au suicide et entre 33% y ont déjà eu recours.
- Le taux de suicide est 20 fois moins élevé une fois que les personnes trans « traité » pour leur trouble de l’identité que chez les « non-traité »
- 24% utilisent des hormones du marché noir.