Aujourd’hui a été une journée vraiment spéciale à plusieurs égards. Après demain, je change de visage et j’ai passé la journée avec l’amour de ma vie. Elle était d’une tendresse et d’un amour bouleversant. Pour la première fois, elle m’a entrelacée en public, de longs moments. Je ne pouvais que sangloter de joie et me trouver chanceuse d’être aimée par une personne si exceptionnelle. Elle sait que j’ai rêvé que j’étais dans un cercueil à la morgue et que bien que je sois consciente que ce n’est probablement qu’un rêve symbolique de cet homme qui meurt, je ne peux pas m’empêcher de songer à cette autre mort possible sur la table d’opération. J’ai mis mes choses en ordre au cas où et nous nous sommes quitté en larme, comme si c’était la dernière fois que nous nous voyons. Nous avons même eu beaucoup de plaisir à passer cette journée ensemble et elle me disait qu’elle se sentait comme durant ces nombreux voyages ou nous déambulions en amoureux, dans ces rues inconnues de villes où nous n’étions jamais allées. Nous avons même eu de nombreux fous rires et j’ai encore en mémoire ce moment où pour nous protéger de la pluie, nous nous sommes réfugiées sous un arbre, sur un banc d’amoureux, juste à côté de l’Hôtel de Ville. C’était un moment magique.
J’ai eu aussi le plaisir de recevoir le téléphone de son fils, qui est aussi celui que j’aurais aimé avoir. Il me souhaitait bonne chance pour l’intervention qui s’en vient et me dit tout l’amour qu’il avait pour moi. D’ ailleurs, la semaine dernière, je le recevais à souper et à un moment donné il me dit comment il trouvait pénible depuis un an de voir toute la douleur et tout l’amour que sa mère et moi avions l’un pour l’autre. J’en pleurais à chaude larme de constater à quel point il avait été le témoin silencieux de cet amour profond que nous avons depuis maintenant 15 ans.
Pui il y a ce mépris. Comme nous avons marché plusieurs kilomètres dans Montréal, nous avons croisé des centaines de gens. Je n’avais jamais remarqué tout ce mépris que des inconnus peuvent m’afficher sans vergogne, parce qu’ils n’aiment pas la transsexuelle que je suis. Des dizaines de gens me regardant avec autant d’insistance et m’envoyant ces regards pénétrants de dédains et de dégouts. Je me sentais réellement comme un lépreux. Cette expérience troublante me pousse encore plus à espérer que ma chirurgie puisse faire de moi une personne normale de nouveau. Quel inconfort constant de se sentir rejetée et mépriser de la sorte. Ce sont d’ailleurs les communautés minoritaires qui sont les pires. Ces Noires, ces hispanophones et ces Portugaises qui me regardaient comme si elles venaient de voir le diable en personne. Jamais je n’oublierais ces regards qui me blessent tant. En marchant entrelacé dans les bras de mon amour pour quelques instants, enfin je me sentais normale de nouveau. Ne serait-ce que pour ces brefs instants. À un moment donné, sur Mont-Royal, je n’en pouvais plus de voir tout ce mépris et je me surpris à songer qui si je mourais sur la table d’opération, ce serait une belle mort. Qui règlerait bien des problèmes pour tout le monde, moi y comprise. Puis j’eu cette pensée pour ces autres trans qui n’auront jamais les moyens de se payer des chirurgies et pour le calvaire qu’elles devront endurer le reste de leur vie. C’est vraiment insoutenable et j’eus beaucoup de chagrin pour elles et pour moi. J’espère vraiment pouvoir être débarrassée de cette méchanceté et de ces incompréhensions, car je ne sais pas si je pourrais survivre à ça encore bien longtemps
mardi 24 juin 2008
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3 commentaires:
Courage Michelle! Oublie ceux qui te regardent avec mépris et pense à tous ceux et celles qui t'admirent! Grosse bise et je penserai à toi le jour de ton opération. Et non, tu ne mourras pas sur la table, tu ne peux pas nous faire ça. Au plaisir de voir ton nouveau visage un de ces jours au Yulblog!
bon ben moi je compte bien te rencontrer pour de vrai quand bordeaux va venir a montreal en mai prochain
alors ULTREIA!
(c le cri de ralliement des pelerins de compostelle pour dire "en route, leve toi et marche quoiqu'il en advienne")
À Panthère et à Stella, ça va me faire plaisir de vous voir toute les 2.
À Stella
C'est drôle que tu parle de Compostelle. C'est un de mes rêves d'y faire le voyage un jour
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